mardi 22 mai 2012

Faut-il enfermer les fous en prison?

Psychiatrie
Un quart des détenus en France souffre d'une maladie psychotique grave telle que la paranoïa ou la schizophrénie. Si l'on prend en compte les troubles plus légers tels que la dépression, on atteint les 40%!* La prison est-elle le lieu de guérison les plus approprié pour de tels malades? 
Non, et c'est la raison qui pousse les pouvoirs publics à essayer de nouvelles réponses. Les UHSA, pour unités hospitalières spécialement aménagées, en sont une. Mises en place il y a tout juste deux ans, ces unités sont aujourd'hui au nombre de trois à Lyon, Nancy et Toulouse. Le programme a pris du retard, mais il est prévu d'ouvrir 17 unités d'ici 2014... à moins que le changement de majorité à l'Assemblée nationale et la crise économique n'en décident autrement et enterrent ces projets.


Pour l'heure, les trois UHSA existantes peuvent accueillir une centaine de "patients". Patients et non pas détenus. La différence sémantique est de taille. Car si les fenêtres des chambres ont des barreaux, le but des séjours en UHSA est de faire progresser les malades pour leur permettre, à terme, de supporter un traitement et un suivi médical en prison. C'est un hôpital avant d'être une prison.


Deux sortes de malades psychotiques errent en prison. Ceux qui y sont arrivés, justement, de par leur maladie. Autrement dit, des "fous" qui ont "dérapé", esclaves de leur pathologie. Et ceux, sains d'esprit à leur entrée, que la prison a cassé et qui sont devenus "fous" à cause de l'enfermement et des conditions de détention, trop fragiles qu'ils étaient pour traverser indemnes cette épreuve.


Ce qui pose deux questions distinctes. D'une part, des conditions carcérales qui amènent des personnes, certes plus ou moins fragiles, à la folie, sont-elles acceptables?  D'autre part, un "fou" est-il responsable de ses actes et doit-il passer plus ou moins longuement par la case prison au risque de s'enfoncer dans sa maladie?


A ces deux questions, il faut répondre: non. Bien qu'il soit compréhensible que les victimes d'un fou réclament, non pas vengeance, mais une punition, la sanction est inutile, voir contre-productive, dans le cas d'une pathologie aussi profonde que la schizophrénie ou la pédophilie. Un fou doit être soigné dans un hôpital psychiatrique. Il ne s'agit pas de faire preuve d'une particulière humanité à son égard. Il s'agit de faire preuve de raison.


Enfin, il faut sans doute mieux étudier le profil des détenus à leur arrivée en prison, notamment leur éventuelle fragilité psychologique. 


Par ailleurs, mais c'est un autre débat, il semblerait que la psychiatrie en France - qui a vu  ses capacités d'accueil considérablement réduites ces 20 dernières années - ait autant à être réformée que le système carcéral... Mesdames Touraine (ministre de la Santé) et Taubira (Garde des Sceaux) ont du pain sur la planche.




                                                                                                            G.D.


La prévention du suicide en milieu carcéral - Rapport au Garde des Sceaux, Commission présidée par le docteur Louis Albrand, aout 2009

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